Avec Laurent Demoulin, directeur Diogènes ASBL, Alain Maron, député bruxellois Ecolo & Charles-Antoine Sibille, médecin psychiatre Cellule d’appui du Smes – Equipe Mobile 107 Précarité
Dans la foulée de la « crise » de la politique de gestion du sans-abrisme à Bruxelles, les acteurs font aujourd’hui face à une réforme importante de leur secteur. Les catégories, méthodes et modalités d’action institutionnelles dont la grande pauvreté est l’objet se modifient et laissent entrevoir de nouveaux cadres de références : si un certain nombre de ces adaptations peuvent répondre aux exigences du dit « secteur », d’autres laissent plus perplexes sur ce qu’elles signifient et sur ce que peut bien impliquer leur mise en pratique.
La nouvelle « Ordonnance relative à l’aide d’urgence et à l’insertion des personnes sans abri » poursuit, notamment, la mobilisation récurrente du registre de « l’urgence ». La future institution en charge de cette gestion, Bruss’Help, serait dépositaires d’une cellule de « gestion de crise », susceptible d’être activée tout au long de l’année. Mais le législateur ne s’est pas risqué à définir clairement dans le texte le mot « urgence ». La seule chose sûre est la disparition, demandée de longue date par le secteur, des fameux « plans hiver » (dont la dernière édition aura lieu en 2018-19).
Il est dès lors légitime de se demander ce qu’est « une (situation de) crise » nécessitant une réaction « urgente ». Le sans-abrisme n’est-il pas, par définition, une crise ? Comment fonder éthiquement et politiquement une hiérarchisation des urgences, et, dans la foulée, une priorisation des actions à mener et donc à financer ? Existe-t-il une situation de grande précarité qui n’autorise pas qu’on puisse parler de crise ? Mais si tout fait crise, la notion elle-même est vidée de son sens, et, partant, la future cellule de gestion de crise promet d’être le théâtre de dilemmes, de tiraillements, voire de conflits, sans fin. A la limite, les « crises » du sans-abrisme ne désigneraient-elles pas les situations susceptibles de menacer le système de gestion du sans-abrisme ? Tant il est vrai que « les crises désignent […] tout type de fonctionnements qui met en péril un système, au-delà de dysfonctionnements partiels ou temporaires, et qui le conduit inexorablement à sa destruction complète »[1].
Alors que des cabinets d’avocats planchent sur les arrêtés d’application de la nouvelle ordonnance, il n’est pas inutile de soulever ces questions et de demander à trois connaisseurs du terrain, à des titres différents (à partir, respectivement, de la politique publique, du secteur du sans-abrisme, du secteur la santé mentale/psychiatrie) de proposer des éléments de réponse.
Objectif de la rencontre : il s’agit de déblayer le terrain, de poser les bonnes questions par rapport à un processus crucial qui est en train de se faire : de fournir au public un état des lieux des questions irrésolues et qui doivent, pourtant, impérativement être posées.
À terme, cette discussion pourrait servir à engager un travail de fond sur les décisions prises quant à cette nouvelle ordonnance et aux nouvelles instances qui en dépendent : poser, pour le secteur et par rapport aux législateurs, l’absence de consensus sur ce nouveau référentiel.
[1]SPECHT, M., « Les représentations sociales des risques à l’origine des risques de crise », Les Cahiers Internationaux de Psychologie Sociale 2010/3 (n°87), p.395.
Le mercredi 5 décembre 2018 de 12h00 à 14h
Chez DoucheFLUX, rue des Vétérinaires 84, 1070 Bruxelles.
Inscription souhaitée (sandwiches offerts) : accueil@doucheflux.be